« Tomber », l’une des clefs de la détente


Vous êtes en train de tomber ! Ne le saviez-vous pas ?
Là, en ce moment, vous tombez ! Si vous levez un bras puis si vous cessez de le lever, il tombe. Si vous levez un pied puis si vous le laissez-le aller, il tombe lui aussi. Placez-vous au-dessus d’un matelas et cessez toute activité musculaire : vous tomberez. Quand vous vous tenez debout ou assis, vous ne faites qu’arrêter votre chute. Quand vous marchez, vous ne faites que tomber par en avant : c’est ce qui vous fait avancer.

La loi de la gravité

Tout ce qui existe tombe. Prenez quelque chose dans vos mains, peu importe l’objet, cessez de le tenir et il tombera. Tout ce qui existe tombe… vers la terre. La terre attire tout vers elle, du plus petit grain de sable à la plus grosse montagne. La lune tombe sur la terre, en tournant autour d’elle. Puis, la terre, la lune et tout ce qu’ils contiennent tombent… vers le soleil. C’est ce qui fait la rotation de la terre autour du soleil. Tout tombe, les sympathiques comme les antipathiques, les gros comme les maigres, les déchets comme les fleurs. Même l’air tombe et reste près de la surface de la terre pour nous permettre de respirer. Il y a l’eau qui tombe pour former les ruisseaux les lacs et les rivières. Comment ferait l’oisillon pour parcourir le monde sans la chute qui le fait tomber du nid ? Comment ferait le mouton pour sauter s’il s’élançait dans l’espace au lieu de tomber ?

Tout cela, vous le saviez déjà depuis que Newton, assis contre un arbre, a reçu une pomme sur la tête, juste à temps pour inventer la « loi de la gravité. » Depuis Newton, la science apporte des hypothèses de plus en plus complexes pour expliquer la gravité.

Les arts du Dao dont fait partie le Taïjiquan, visent à observer et à imiter le vivant. Comme le vivant est trop vaste pour être saisi par des mots et par des concepts humains, il ne peut s’exprimer que comme un art, une célébration, une communion.

Dans le Taïjiquan, le phénomène de la gravité n’est pas analysé ni quantifié comme dans la science mais il est plutôt observé globalement et dans ses relations avec d’autres éléments dont la détente.

« Tomber » permet le relâchement musculaire

Un muscle se contracte pour effectuer un certain travail. Quand la contraction musculaire cesse, le muscle ne revient ni facilement ni rapidement à son état initial. Pour que le muscle se relâche complètement, il faut qu’il bouge soit par l’action d’un autre muscle, soit par l’action de la gravité ou par la combinaison des deux. Dans tous les cas, le relâchement musculaire complet provient du mouvement.

Si, durant une journée, le mouvement est insuffisant, à la fin de la journée, la détente est incomplète. Quelquefois, la nuit ne suffit pas à faire disparaître les tensions. Si, de façon répétitive, le corps manque de mouvement, les nœuds et les tensions s’accumulent. Il peut alors se produire des troubles au niveau de la structure corporelle, des troubles de mobilité, des troubles organiques et même l’apparition de maladies.

Le mode de vie actuel ne favorise pas le mouvement. Au travail, dans nos déplacements et dans nos loisirs, nous passons la plus grande partie de notre temps avec, somme toute, peu de mouvement.

Les lointains inventeurs du Taïjiquan ont observé que le mouvement était une des expressions les plus importantes du naturel et qu’une existence naturelle est une existence pleine de mouvements. Le mouvement c’est la vie, l’absence de mouvement c’est la mort.

« Tomber » pour retrouver la détente

Tout le Taïjiquan est basé sur le mouvement. Certains mouvements sont faits au sol et d’autres debout. Les mouvements faits au sol sont plus limités, mais nécessaires pour préciser des éléments en particulier. Les mouvements debout sont plus complets et permettent d’intégrer ce qui a été fait au sol.

Plusieurs techniques de détente Taïjiquan font appel à la gravité. « Tomber » est l’une des clefs de la détente. Si on sait s’y prendre, « tomber » fait disparaître les nœuds et les tensions d’un corps qui a été longtemps privé de mouvement. Voici les principales techniques de détente taijiquan qui utilisent ce principe :

Techniques à faire au sol
  • La roulade simple : croiser une jambe, l’une par-dessus l’autre et tomber sur le côté.
  • La roulade complète : tenir un pied et rouler en tombant de chaque côté.
  • Faire tomber les épaules : tirer le poignet et faire tomber l’épaule.
  • La détente du bassin avec l’horloge : bouger le bassin et le faire tomber pour chercher les heures de l’horloge.
  • La détente par le « lourd » : inspirer profondément et soupirer en invitant le corps à tomber
Techniques à faire debout
  • Jouer à Cro-Magnon pour faire tomber les bras
  • Jouer à perdre la jambe
  • L’enracinement dans la forme : faire tomber le corps en le laissant s’affaisser entre l’inspiration et l’expiration.
  • La petite détente dans la forme : faire tomber le corps en le laissant s’affaisser entre l’expiration et l’inspiration.
ATTENTION ! Les indications pour l’exécution des techniques précédentes permettent uniquement de les reconnaître. Les détails pour les exécuter correctement manquent. Toutes les techniques de Taïjiquan doivent être apprises auprès d’un professeur compétent. Celui-ci s’exécutera lui-même de manière correcte, donnera les explications requises, en vérifiera l’exécution par ses élèves puis fera les corrections qui s’imposent. Les blogs, les livres et les cassettes vidéo ne doivent être utilisés que pour compléter un cours.

Exemple de technique
Jouer à Cro-magnon pour faire tomber les bras
  • Debout dans la posture du cavalier
  • Levez les bras à environ 45 degrés, laissez tomber et constater la détente finale des bras.
  • Levez les bras encore une fois, puis laissez tomber uniquement les épaules, ensuite les coudes et enfin tout le reste. Constatez la détente finale des bras. Remarquez la douceur de l’opération.
  • Levez les bras encore une fois puis, sans brusquerie, faites à nouveau la dernière opération. Constatez encore la détente finale. Remarquez la douceur encore plus grande de l’opération.
  • Levez les bras encore une fois puis placez la main du Taïjiquan selon la méthode adéquate et sentez comme l’épaisseur d’un coussin dans chaque main. Faites à nouveau l’opération précédente en observant la descente lente et douce des deux coussins.
  • Dans la posture « sonder le bras » de la forme des 11 postures, quand la main revient au coude après s’être écartée sur le côté, faites une mini pause, puis sentez l’épaisseur du coussin dans les deux mains. Laissez tomber successivement les épaules, les coudes et tout le reste. Assistez à la descente des deux coussins. À ce moment là, quelque chose n’échappe-t-il pas à votre contrôle ? Ne vous semble-t-il pas que ce mouvement a une part d’imprévisible ? C’est un signe de la manifestation du naturel.
  • Faire la même expérience dans « les mains comme des antennes » de la forme des 11 Postures.
  • Faire la même expérience dans toutes les autres postures de la forme des 11 Postures.
  • Faire la même expérience dans la forme des 24 Postures et dans les autres formes.
  • Constatez que dans toutes les descentes, dans toutes les postures du Taïjiquan, les mains descendent de la même façon.


Les Choristes - Sous La Pluie