Échos des grands stages de l'été 2015

Oleg_Shuplyak-6.jpg
Il y a eu deux grands stages, le premier à Montréal et le second à Sainte-Félciié-de-Matane. On a dit aux participants du premier grand stage que c’était le meilleur, car le premier jet est toujours le meilleur, le plus spontané. On a dit aux participants du second stage que c’était le meilleur, car le second stage s’inspire du premier pour aller plus en finesse et plus en profondeur.

Le plus drôle est que dans les deux cas, nous avions raison.

En gros, les grands stages se sont déroulés un peu comme ceux de l’an dernier. Même thème, même lieu, même ambiance. Les participants étaient enthousiastes et la température idéale. Au grand stage de Sainte-Félicité, la mer était imprenable, le ciel étonnant et l’accueil de nos hôtes chaleureux et efficace.

Nous avons abordé sensiblement les mêmes techniques que dans les grands stages de l’été 2014.
Les voici :

  • Le qigong primitif et le taïjiquan avec les constituants pêle-mêle mais peu développés et tous présents.
  • Le qigong du regard qui comprend : le regard éparpillé, le regard concentré, le regard attentif aux mains, le regard, ouvert, le regard diffus, le regard à l’horizon, le regard ouvert sur l’horizontale, le regard ouvert sur la verticale, le regard tel un hublot, le regard qui embrasse, le regard périphérique, le regard sans catégorie et le regard axial.
  • Les randonnées du pouce et la fréquentation des réalités alternatives.
  • Les mains collantes et une non-rencontre avec l’autre.
  • Le micro-taïjiquan et la structure de base du taïjiquan.
  • La culture du ZHI et la cohérence du cœur.

On a joué avec la flamme sans mettre le feu.
On a perdu la tête avec le cœur bien accroché.
On est devenu insensé en toute lucidité.
On s’est recueilli sans se regarder le nombril.

Pour d’autres informations sur les constituants du taïjiquan, voir les grands stages de l’été 2014.


Oleg_Shuplyak-6.jpg


LE MICRO-TAÏJIQUAN

La nouveauté des grands stages de cette année a été la découverte du micro-taïjiquan.

Il est plus courant d’apprendre le taïjiquan en développant d’abord les constituants structurels. On passe ainsi de la forme aux postures puis aux manœuvres et aux phases. Viennent ensuite les constituants organiques et, beaucoup plus tard, les constituants subtils, bien que présenst implicitement, peuvent être abordés plus spécifiquement. Dans le micro-taïjiquan, on fait l’inverse, car dès le départ on inclut les treize constituants mais en dosage minimal. On s’intéresse ainsi à l’essentiel qui constitue la structure de base du taïjiquan (Liste des constituants ici).

Le micro-taijiquan permet dans un premier temps d’illustrer concrètement les treize constituants du taïjiquan. On pourrait être tenté de se contenter du micro-taïjiquan au lieu de continuer à le développer, sauf que sa très grande simplicité ne permettrait pas une manifestation achevée de tous les constituants. De plus, tandis que le mico-taïjiquan s’obtient assez rapidement, le taïjiquan lui, à l’instar de certains plats, a besoin de mijoter longtemps.

 


LE ZHI

Le ZHI est l’un des constituants subtils les plus importants du taïjiquan.

La signification moderne du ZHI correspond à : sagesse, résolution, détermination, aspiration, ambition, intuition et volonté.
Sa signification ancienne, celle qui nous intéresse le plus, est : l’intention pure, le commandant suprême du Qi, coordinateur du Qi.
Rappelons que le Qi (chi) qui peut être traduit par énergie vitale a lui aussi une importance vitale dans le taïjiquan.

 

Avec le ZHI, la grande question qui est posée est : 
Que faire de sa propre vie ? 
Un des plus beaux objectifs qui peut être proposé à chacun est 
de se conduire en humain (wei ren 为人), 
de devenir un humain (cheng ren 成人), 
car pour la pensée chinoise, ce n’est pas acquis. 
L’idée de ZHI 志 affirme donc la capacité, 
le pouvoir pour l’être humain de définir un sens à donner à sa vie 
et de le réaliser. 

HO Manh Trung 
(La notion de zhi et ses corrélats dans la culture chinoise.
Une méthode pour conduire sa vie, 
Université Paris Diderot, (Paris 7), 2011. p. 227.)

 


Tandis que la majorité des constituants du taïjiquan font appel à des expériences, le ZHI appartient plutôt à la non-expérience. Le ZHI concerne la pensée, les sens et l’ego. On ne peut donc faire un objectif de son développement ou de son déploiement et on ne peut l’amener à se révéler par des techniques. Il arrive cependant que certains jeux développent ce qui permet une observation des processus concernant le ZHI.

Le ZHI est le domaine de l’inconcevable, de l’imperceptible et de l’impersonnel donc il donc est presque impossible d’en parler. Sauf peut-être de la façon suivante :


L’INCONCEVABLE

« Ce qu’on est est inconcevable ! » Au-delà de l’écran de nos représentations, nous ne pouvons percevoir la réalité de la conscience avec les outils du mental. JEAN BOUCHART D’ORVAL nous invite à recontacter nos ressentis subtils et tactiles, pour percevoir cette vérité hors des limites de nos modes de connaissances.
Lire la suite.

L’IMPERCEPTIBLE

C’est un grand carré dont on ne voit pas les angles ; un grand vase qui semble loin d’être achevé ; une grande voix dont le son est imperceptible ; une grande image dont on n’aperçoit point la forme ! LAO-TSEU
Lire la suite.

L’IMPERSONNEL

Tout ce qui se passe est simplement l’Unité. L’un s’exprimant. Il n’y a pas un d’autre. Et dans cela qui se passe émerge l’idée qu’il y a une entité séparée à qui tout cela arrive. Je suis une personne séparée. Tony Parsons
Lire la suite.


UN JEU DU ZHI

Si vous observez les peintures d’Oleg Shuplyak vous verrez bien le jeux des illusions de notre cerveau. Vous en avez une au début du blog et quelques autres plus loin.

1) Distinguer d’abord les deux images qui se superposent : le paysage et le visage. Aller de l’un à l’autre. Arrêtez vous au visage et essayez de ne plus tenir compte du paysage. Faites l’inverse. Vous ne distinguez pas bien le visage ? Éloignez-vous de l’écran et/ou rapetissez l’image et/ou fermez presque les yeux. Essayez l’une puis l’autre des peintures elles ne donneront pas la même chose. N’oubliez pas celle du début du blog, tout en haut d’ici.

2) En arrêt au visage, amusez-vous à tantôt distinguer le paysage et à tantôt ne plus le distinguer. Faites l’inverse. prenez votre temps.

3) Aller du visage au paysage et vice-versa en prenant de plus en plus votre temps pour changer. Durant le changement, il vous semble ne rien distinguer, il y a comme un vide. Durant ce qui vous semble être vide, alors qu’il vous semble que vous ne voyez rien, en fait, vous voyez tout, mais ne distinguez rien, un peu comme un bébé.

P.S. Ne chercher pas à distinguer ce vide quand il se produit, mais, après coup, réalisez que ce vide n’était pas vide. Ne cherchez pas à vous rappeler de quoi était fait ce vide après qu’il se soit produit, c’était seulement un vide qui n’était pas vide. Contentez-vous de ce souvenir qui n’est pas un souvenir comme les autres, ne cherchez pas à le bonifier. Cela ne vous apporte rien ? Cela ne rime à rien ? Vous ne voyez pas l’utilité de la chose ? Le gain, le sens, l’utilité appartiennent à l’ego. Quand ils sont absents, ce sont là des signes de la non-expérience, des signes du ZHI. Pour le moment, contentez-vous de cette non-expérience. Ceci est la difficulté du ZHI. Rappelez-vous que le ZHI est un des constituants les plus avancés du taïjiquan. Voici vers quoi les autres constituants du taïjiquan et les milliers d’heures d’apprentissage et de pratique peuvent mener. Sans l’ensemble du taïjiquan, c.-à.d. sans les treize constituants (la forme, la posture, la manœuvre, la phase, le mouvement, la détente, l’alignement, la respiration, la Qi, le shi, le yi le zhi et le xin), les jeux du ZHI peuvent facilement rester un simple divertissement.

Mais enfin, à quoi peut bien me servir tout ceci me direz-vous ?
Tout ceci ne servira à rien à qui vous êtes, mais pourrait bien être une belle célébration de ce qui est...

oleg-shuplyak-2.jpg

Oleg_Shuplyak-4.jpg


Oleg_Shuplyak-3.jpg
 

Oleg_Shuplyak-10.jpg
Oleg Shuplyak

 

 


UN AUTRE JEU DU ZHI

Écoutez la musique enivrante de Chopin. Prêtez attention aux silences entre les notes, ce sont eux qui donnent une saveur si magique aux notes.

Essayez d’écouter les silences. On ne les écoute pas de la même façon qu’on écoute les notes. Les silences révèlent les notes et les notes révèlent les silences. L’écoute véritable se produit avec tantôt la saisie de notes et tantôt la saisie de silences, ainsi que par la combinaison de deux façons d’écouter.

 

 

 

L’ÉCOUTE DU SILENCE

« En composant un morceau qui ne contiendrait aucun son, je craignais de donner l’impression de faire une blague, voyez vous. En fait, j’ai travaillé plus longtemps à mon morceau “silencieux” qu’à aucun autre. J’y ai travaillé quatre ans… »
John Cage
___________________
Source: IRCAM

 

« Quel est le sens de cette oeuvre ? Bien que son compositeur la décrive comme 4 minutes et 33 secondes de silence, elle est en fait constituée par les sons produits par l’environnement dans lequel elle est jouée…

Le compositeur veut ainsi mettre en avant le fait qu’il est impossible de trouver un silence parfait…"

____________________________________
Source : lamusiqueclassique.com